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Ce week-end d'octobre, deux objectifs pour notre association, le PAAC-Archéologie : samedi, nous partons à la découverte du trésor du Prince de Lavau à Troyes et dimanche, nous nous intéresserons au trésor de la princesse de Vix à Châtillon-sur-Seine, deux personnages mythiques qui vivaient alors dans cette région au début du V°siècle avant J.-C.
Lavau au nord et Vix au sud, toutes deux situées sur une Seine encore toute jeune, ne sont séparées l’une de l’autre que de 70 kilomètres. Nous sommes à cette époque à la fin du premier Âge du Fer : période de Hallstatt qui tire son nom du site éponyme situé en Autriche et daté entre environ 1 200 et 500 av. J.-C.
Le lac de Hallstatt. Les mines de sel sont situées dans la falaise, à gauche. Photo Yvonne Garnier.
L'Europe proto-celtique (civil. de Hallstatt) vers 500 av. J.-C. (Jean Loicq, Universite de Liege)
Étain pour la métallurgie du bronze et également ambre en provenance de la baltique pour les bijoux, c’est sur cette prospère route marchande que princesse et princes hallstattiens, en échange de leurs «protection», imposaient les commerçants. Ils ont ainsi amassé de fabuleuses richesses.
La route de l'étain.
Dame de Vix et Prince de Lavau, comme c’était la tradition à l’époque, se sont fait inhumer avec tous leurs trésors dans de somptueuses tombes à char recouvertes de tumulus faits de pierres et de terre.
Ce sont ces trésors que nous allons découvrir enfin après une reconnaissance sur le terrain.
Le site de Lavau est situé dans la banlieue industrielle et commerciale de Troyes. Excepté un champ en friche entouré de bâtiments, il n’y a pas grand-chose à voir et seul un instant de recueillement nous est octroyé. https://fr.wikipedia.org/wiki/Complexe_funéraire_du_Moutot_à_Lavau
Pourtant c’est à cet endroit qu’une exceptionnelle tombe à char au sein d’une nécropole très bien conservée a été révélée et fouillée en 2015 par l’INRAP au cours d’une opération de 6 mois. Cette tombe était recouverte d’un tumulus de 40 mètres de diamètre et de 10 mètres de hauteur ceint d’un fossé, accolé sur une de ses faces à un enclos funéraire plus ancien.
Vue aérienne d'un grand fossé ceinturant un tumulus princier Une daté du début du Ve siècle avant notre ère, à Lavau (Aube), 2015 © Denis Gliksman, Inrap. Archéologue responsable d'opération : Bastien Dubuis
Le Prince était inhumé paré de bijoux et allongé sur le plateau d'un char à deux roues conformément aux traditions funéraires de cette époque. Il était entouré de toutes ses richesses et d'un riche mobilier destinés à l’accompagner dans l’au-delà au cours d’un dernier fastueux banquet.
Le prince de Lavau repose avec une riche parure, composée en particulier d'un torque et de bracelets en or, mais aussi de bijoux en ambre, en fer et en corail. Détail des poignets du squelette Autour de chaque poignet repose un bracelet en or. © Denis Gliksman, Inrap. Archéologue responsable d'opération : Bastien Dubuis
Et voici la pièce maîtresse de la tombe : un grand cratère en bronze d’un mètre de diamètre pouvant contenir jusqu'à 300 litres de vin. Il est équipé de quatre poignées décorées avec la tête du dieu fleuve Achéloos et orné de huit têtes de félins en hauts-reliefs.
Ce cratère est encore en étude et restauration, nous ne le verrons pas au musée de Troyes qui expose seulement quelques magnifiques exemples de l’artisanat de cette époque.
Détails des anses du cratère en bronze au décor figurant le dieu-fleuve Acheloos. Détail de la tête de félin ornant l'ouverture du cratère en bronze. © Denis Gliksman, Inrap. Archéologue responsable d'opération : Bastien Dubuis
Parmi les bijoux exposés au musée de Troyes et qui paraient le prince dans sa tombe, se détachent un énorme torque en or d’un poids de 580 grammes orné de monstres ailés et des bracelets en or dont l’usure présuppose qu’ils ont été souvent portés. Un couteau dans son fourreau, des perles d’ambre, des accessoires de vêtement, agrafes, rivets en fer et bronze ont été retrouvés sur le prince.
Festoyer au cours de somptueux et généreux banquets était également le moyen de montrer sa puissance et d’affirmer son pouvoir.
Le torque. Photo J. Lentignac, Exposition "ArkéAube, des premiers paysans au Prince de Lavau", Hôtel-Dieu de Troyes, 2018.
L'un des bracelets. Ph. J. Lentignac (idem)
Le cratère, élément principal du service de boisson, est accompagné de nombreux accessoires : une passoire pour filtrer le breuvage épais, une cuillère coudée en argent et une cruche à vin d’origine grecque en céramique avec des sertissages d’or et d’argent et décorée d’un thème dionysiaque. Pour boire, des canthares et des kylix (vases de différentes tailles et richement décorés) se trouvaient sous le cratère.
Cruche à vin et cuiller. Photo J. Lentignac, Exposition "ArkéAube, des premiers paysans au Prince de Lavau", Hôtel-Dieu de Troyes, 2018.
Ces richesses, dont certaines étaient originaires du bassin méditerranéen antique, confirment les échanges déjà existants entre les mondes Celtes et Grecs.
Ce petit « Prince » de l' Âge du Fer dont l’habitat n’est pas identifié mais qui se situerait probablement sous la ville de Troyes était le gardien d’un centre de pouvoir protohistorique sur la Seine. Certainement en relation avec le petit royaume de la Princesse de Vix qui appartenait comme lui au peuple Celte des Lingons, il en était peut être le parent ou le vassal ?
Dans un prochain article, nous rendrons visite
à la Princesse de Fer
Jean LENTIGNAC, du PAAC-Archéologie.